3 décembre 2024

APST – Hommage à Dominique Lalanne

Un courageux citoyen vient de nous quitter. Toute sa vie il a porté un combat difficile . L’abolition des armes nucléaires

Ce Jeudi 17 février  à 18h30: L’hypocrisie nucléaire : de la stratégie de dissuasion à la gestion des déchets, quelles vérités ?

Nous reprenons cet article paru dans Le Télégramme car il résume la problématique de ce devoir citoyen…

Armes nucléaires. Un lauréat du prix Nobel ce mardi à Lannion

(Publié le 11 décembre 2017)

Dominique Lalanne copréside l’association Abolition des armes nucléaires, l’une des nombreuses organisations non gouvernementales regroupées au sein
d’Ican. (Photo DR)

Le prix Nobel de la Paix a été remis ce dimanche à Oslo, en Norvège, au représentant de la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires, Ican selon le sigle anglais. Ce collectif d’associations a contribué à l’élaboration du récent traité de l’Onu sur l’interdiction des armes nucléaires. Dominique Lalanne, l’un des fondateurs de Ican-France, est l’invité, ce mardi soir, de Sortir du Nucléaire-Trégor.

On assiste à une partie de ping-pong entre provocations du dirigeant nord-coréen et rodomontades va-t-en-guerre du président américain.
Cette escalade peut-elle mener au pire ?
Ça pourrait dégénérer, c’est vrai. Mais pas tant du côté de la Corée du Nord, car on voit mal en quoi elle aurait intérêt à prendre une initiative guerrière.
Du côté américain, on n’est pas inquiet d’une agression de la Corée du Nord. D’ailleurs, les forces américaines dans le Pacifique ne sont pas en état d’alerte.
Le problème, c’est qu’on a du mal à cerner des gens comme Trump, du point de vue de leur émotivité et de leurs réactions qui, parfois, peuvent être surprenantes. Ça, c’est une vraie préoccupation.

Reste que le « provocateur », vu d’Occident, c’est Kim Jong-un, non ?
Oui, mais il faut relativiser les choses. Ce que veut le dirigeant de la Corée du Nord, c’est sauvegarder son régime. Il a, à peu près, la même attitude qu’ont eue beaucoup de pays qui voulaient se parer de la doctrine de dissuasion du faible au fort : le faible, avec quelques armes nucléaires, tient en respect le fort. Cette doctrine a été celle du général de Gaulle par rapport à l’Union soviétique.

Ce qui inquiète beaucoup la communauté internationale, c’est que si ce standard continue à exister, d’autres pays voudront acquérir l’arme nucléaire, et on rentre dans une spirale de prolifération.

Depuis la Guerre froide, en France, la bombe nucléaire est présentée comme notre assurance-vie, comme le gage de notre indépendance aussi.

Quelle est votre opinion ?
Telle que l’a présentée le général de Gaulle, la dissuasion est censée marcher automatiquement, dans un contexte où les ennemis ont la même logique, sont rationnels et ne vont pas s’attaquer parce que ça correspondrait à une annihilation générale.
Mais le scénario où la dissuasion ne marche pas est un scénario catastrophe.
Avec l’évolution du temps, on se rend compte que plus il y a d’états nucléaires, plus on risque de tomber soit sur un fou, soit sur quelqu’un qui n’a pas notre logique, soit sur quelqu’un qui commet une erreur (*).

Des pourparlers de réduction des arsenaux nucléaires ont déjà été menés dans le passé entre États-Unis et Union Soviétique. Étaient-ils crédibles ?
Ces traités bilatéraux Start ont entraîné une diminution énorme du nombre de têtes nucléaires. On est passé dans les années 1970-1980 de 70.000 à 15.000.
Mais avec 15.000 armes nucléaires, on fait encore sauter la planète !
En 1986, à Reykjavik, Gorbatchev a fait une proposition assez extraordinaire à Reagan, d’éliminer toutes leurs bombes nucléaires dans les dix ans. Reagan a refusé finalement,
il s’est rendu compte que l’appareil militaro-industriel américain ne pouvait pas suivre une telle décision parce qu’il y avait trop d’intérêts en jeu.

Si les pays détenteurs de l’arme nucléaire ne signent pas ces traités, l’abolition n’est-elle pas une utopie ?
C’est sûr que le traité ne crée pas d’obligation automatique et impérative, mais dans la pratique, quand un traité international existe, cela crée une pression sur les états, sur leur opinion publique. On l’a bien vu avec les armes chimiques.
Les pays en désaccord sont obligés, petit à petit, d’obtempérer.
Pour les armes nucléaires, c’est plus compliqué dans la mesure où tous les états nucléaires sont opposés à tous les états non nucléaires. Mais les choses peuvent changer dans les années qui viennent.

Souhaiteriez-vous un référendum sur la question en France ?
Je suis très sceptique sur la pertinence d’un référendum, son efficacité et ensuite, la capacité à répondre réellement indépendamment de toute pression, à une question. Avec le référendum sur l’Europe, j’ai vu qu’on pouvait décider quelque chose et faire le contraire après.

Le ministère de la Défense fait tous les ans un sondage pour savoir ce que pensent les Français des armes nucléaires et la question est tournée de telle façon (pensez-vous que l’arme nucléaire est un plus pour la France ?) que ça donne envie de garder l’arme nucléaire. Réponse : 70 % de oui.

Mais quand le Mouvement de la paix fait un autre sondage en demandant : pensez-vous que la France doit participer à l’élimination des armes nucléaires, 70 % des personnes aussi disent oui.

La question du référendum est un peu piégeante parce qu’elle induit d’une certaine façon une réponse.

 

* Dominique Lalanne fait référence à un « bug », en 1983, dans le système d’alerte satellite qui indiquait à l’Union soviétique qu’elle était attaquée par cinq missiles américains.